samedi 15 septembre 2007

Mehdi "Lbantouri" -12- Le scorpion et le châtiment

Un soir, juste après le souper, alors qu’il s’apprêtait à dormir, son maître lui réclama à boire. Une bougie à la main, il alla vers la jarre d’eau pour remplir la carafe quand soudain il aperçut un scorpion noir aussi grand qu’un pouce qui escaladait la jarre. Pris de panique il laissa échapper la carafe en terre cuite de ses mains et revint en courant vers son maître, les yeux écarquillés d’épouvante.
Quand il eut raconté en bégayant sa mésaventure, l’homme se leva, comme pour aller voir, mais une fois à sa hauteur, il lui asséna un coup terrible sur la tête, le traitant de poltron et lui sommant de retourner vers la jarre. Mehdi sentait ses membres rivés de peur et de déception. La peur de revenir vers la jarre où la bête rodait encore et la déception parce que l’homme qui le croyait gentil et généreux, s’était soudain retourné contre lui. Il se sentait alors persécuté et son discernement des choses de la vie se mélangeaient dans son esprit. Il détala et alla voir la femme, les yeux rouges, au bord des larmes et lui demanda de l’aider à se débarrasser de la bête près de la jarre pour qu’il puisse ramener de l’eau à boire à son mari.
La femme munie d’un bâton, l’accompagna, écrasa la bête et lui remis l’eau de la jarre dans une autre carafe qu’il porta à son maître.
Cette nuit là, il ne ferma point les yeux, en raison d’abord de la peur bleue qu’il eut d’autres bêtes de ce genre et ensuite du comportement inhumain et sévère de son maître à son égard.
Alors que l’Emir Abdelkrim se révoltait au rif (en 1921) et décimait quelques quinze mille soldats espagnols, Mehdi devenu allergique à la violence qu’il subissait de la part de personnes que les liens de sang ou des circonstances ont mis sur son chemin, se révoltait à son tour et se jurait de repartir aux premières lueurs de l’aube. Il décida alors, après trois ans de calme et de plénitude, de quitter cet endroit où à son arrivée il espérait ardemment finir ses jours, tellement il s’y plaisait

4 commentaires:

Pas a pas a dit…

Un geste, un malheureux geste et voila mehdi sur les routes après 3 ans de plénitude
Tu vas me dire que je radote, mais à l'age de 18 ans mon père qui travaillait chez un maraîcher,il voulait aller voir le tour de France et c'était un dimanche
Son patron lui interdit, mon père y alla quand même, quand sur la route du retour il vit une affiche "engager vous pour pacifier le Maroc" (nous discuterons plus tard sur la vue colonialiste du mot pacifier)
En rentrant le soir, il ramassa ses affaires, et se retrouva a Marseille pour le Maroc
1921 abdel krim mene sa juste révolte et lui en 26 se retrouve à casa pour « pacifier le Maroc »
Quand je te dis que nos père ont menés des vies parallèles et semblables
amities patrick

Majid Blal a dit…

Bonjour Salah.
On dit bien que " Le chat échaudé craint l'eau froide" Le jeune Mehdi ne veut plus qu'on lève la main sur lui. La rebellion est souvent la réaction ultime des gens qui se découvrent impuissants devant l,injustice ou la maltraitance. Et dire qu'il y en a qui pensent que plus on subit de coups, plus on a la peau épaisse et dure! alors que c,est l,inverse,on devient écorché vif avec la sensibilité à fleur de peau.
Bravo pour avoir rendu le récit touchant car il faut être capable de se mettre à la place du personnage pour regurgiter le senti. L'émotion.
Amicalement

S.Abdelmoumène a dit…

Bonjour Patrick,

Tu verras dans la suite quand son chemin croisera à nouveau son père, où j’essaye de ressortir fidèlement ce qu’il m’a décrit. Eh bien je te jure que je me retrouve des fois à cours d’attributs pour qualifier certaines situations, tellement biscornues et tellement illogiques dans mon référentiel que je ressens à la fin de mon récit un arrière gout d’un rendu médiocre voire inadéquat. Jusqu’à présent les grandes innovations du siècle parlent de gestion des ressources humaines, de référentiel de compétence, plan de carrière etc…
Moi je dis qu’il faut aller plus loin et parler de gestion des humeurs humaines. Son père avait cela dans le sang, il pouvait changer d’humeur 36 fois dans la journée et c’est toujours Mehdi qui subissait.

S.Abdelmoumène a dit…

Bonjour Majid,

Très juste, lui il s’est forgé une carapace dans sa jeunesse à tel point qu’une fois à l’âge adulte il était devenu vraiment à l’épreuve des agressions morales ou physiques que le commun des mortels peut lui porter.
Quand je parlerais des tortures qu’il a eues à son retour d’exil ou bien en prison à Ain Moumen tu saisiras pleinement le sens des propos sus cités.