mardi 2 octobre 2007

Mehdi "Lbantouri" -(17)- Le sens de l'asile

A l’approche de la première chaumière, les aboiements d’un chien se faisaient entendre de loin, mais averti comme il l’était, Mehdi s’arma tout de go de deux gros cailloux et continua son chemin d’un pas assuré. Quand soudain les aboiements du chien s’estompèrent et un rayon de lumière vint couper l’épaisseur de la nuit juste au devant de lui.
Mehdi se retourna et vit une personne debout sur le seuil de la maison, entrain de calmer son chien. Celui-ci, comme désenchanté de ne pouvoir goûter au mollet du visiteur, poussait des cris mélangés de grognements qui en disaient long sur ses intentions.
Maintenant Mehdi était entièrement éclairé et salua le propriétaire de la main. La taille de l’enfant mit la personne en confiance qui s’enhardit à avancer vers lui pour s’arrêter à quelques mètres de la clôture en pisé qui entourait son logis.
Mehdi demanda asile pour la nuit et expliqua rapidement qu’il venait d’un douar à proximité de Khémis Meskala et qu’il était en quête de travail.
La demande d’asile fut acceptée et Mehdi fut prié de renter chez son hôte pour la nuit.
La nuit noire et le coin de l’œil qu’il usait pour surveiller le chien belliqueux devenu très pressant à l’approche de la porte l’empêcha de se faire tout de suite une idée sur l’extérieur du logis de son hôte.
Mais une fois à l’intérieur, il se retrouva dans une grande pièce où les murs tout en pisé laissaient apparaître par endroit des fétus de pailles bistrés donnant du relief aux enduits de terre. Deux troncs d’arbre découpés sans égards formaient un genre de péristyle et étayaient une longue traverse qui servaient de soutient aux poutrelles supportant le chaume de la toiture.
Un rideau en tissu masquait un passage vers l’arrière maison. La pièce est éclairée par une autre lampe à carbone accrochée à une esse elle-même suspendue au plafond.
A gauche, des tapis à motifs polymorphes rendant un noir lâche sur fond vermillon ou jaune foncé, étaient étalés sur un demi-périmètre de la pièce au dessus d’une grande natte en joncs entrelacés qui frôlait le coin du feu.
Sur la droite, un métier à tisser était debout et une ébauche d’une pièce en laine à rayures noires, laissait présager la venue au monde d’une défroque pour adulte. C'est sûrement une djellaba, au pire un burnous, se disait-il.
L’âtre où quelques bûches crépitaient encore, rompant ainsi le silence, rajoutait à cet intérieur, une beauté dans la simplicité.
Ce décor, quoique rudimentaire, n’était pas nouveau pour lui mais il y trouvait cette fois-ci quelque chose de différent. Il y sentait de la chaleur humaine, de la bonhomie. Mehdi s’assit et s’adossa incontinent au mur juste en face de l’ouvrage de laine. Ce climat de détente, cette sensation de sécurité, ajoutés à sa longue marche de la journée eurent raison de lui et le plongèrent dans une somnolence à laquelle il essayait de résister. Il fermait les yeux et les rouvrait par intermittence de peur d’être surpris par son hôte de fortune.
Mohamed, son hôte qui était pendant ce long moment passé de l’autre côté du rideau, revenait avec un plateau à la main, qu’il déposa aux pieds de son jeune visiteur.
Le thé qu’il venait offrir à son invité était en ces temps là une marque du bon recevoir inné chez ces gens là.
Mehdi raconta par bribe son histoire à son hôte qui lui promit de l’aider à trouver du travail.
Mohamed prit congé de son invité, après avoir soulevé un tapis à même le sol et le remit à Mehdi en guise de couverture.

5 commentaires:

Pas a pas a dit…

bonjourS.Abdelmoumene
comme toujours c'est avec un grand plaisir que je viens de lire ton article,et tu sais nous tenir en haleien,on a envie de dire et alors la suite!!!!!
j'ai aimé la description de la maison elle me rapelle celle de mon enfance quand nous etions inviter a manger le tagine le couscous ou tout simplement du pain du beurre et du miel avec les doigts
quelle plaisir
merci
patrick

Dr Mouhib Mohamed a dit…

Bonjour salah ton poste d'aujourd'hui fait ressortir une qualité Marocaine ancestrale: la reception d'un voyageur "l'hote de Dieu"" anebiye n'rabbi".Sa venue est un honneur ;et il est recu avec la formule m'rahba,repousser les invités était une honte et une humiliation que meme les plus pauvres ne pouvaient supporter.Par ailleur bravo pour la description de l'interieur d'une piéce rurale du debut du siècle passé .Amitiés

S.Abdelmoumène a dit…

Bonjour Patrick,

Moi même qui suis natif de Midelt, quand j'y fais un saut maintenant, et que je rentre dans une de ces vieilles masures à "Atman ou moussa" ou "Berrem" je ne peux m'empêcher d'apprécier à chaque fois l'accueil très chaleureux dont je fais l'objet. Le peu de moyens matériels dont ces gens disposent, est largement compensé par la richesse et la grandeur de l'âme dont elles jouissent. Ces gens là ont compris très tôt que pour être heureux il faut connaître ses limites et celui qui découvre ses limites trouve la sagesse, la sérénité et le bonheur.....

S.Abdelmoumène a dit…

Bonjour Dr,

Merci pour tes compliments si med, je rappelle que le mérite du déclic te revient de droit. Si cet essai arrive à terme, tu es prévenu, c'est toi qui fait la préface.

Salah

Dr Mouhib Mohamed a dit…

Bonjour,
Ce sera avec grand plaisir, et c'est un honneur pour moi de préfacer une oeuvre aussi importante que celle là. Pourvu que ce soit dans mes modestes capacités.
Merci.